lundi, janvier 30, 2006

40 principes pour stimuler l'innovation [TRIZ]

Voici 40 principes pour stimuler l'innovation

à utiliser seuls ou avec la matrice des contradictions (voir TRIZ)

 

  1. La segmentation
    • Diviser un objet en parties indépendantes
    • Créer des sections et sous-sections
    • Augmenter le degré de segmentation d’un objet
  2. L’extraction (Extraire, Récupérer, Enlever)
    • Extraire la partie ou propriété « gênante » d’un objet
    • Extraire seulement la partie ou propriété nécessaire d’un objet.
  3. la qualité locale
    • Transition d’une structure homogène à une structure hétérogène d’un objet ou de l’environnement extérieur (action)
    • Différentes parties d’un objet accomplissent différentes fonctions
    • Chaque partie d’un objet doit être placé dans les conditions les plus favorables pour effectuer son action
  4. l’asymétrie
    • Remplacer les formes symétriques par des formes asymétriques
    • Si un objet est déjà asymétrique augmenter son degré d’asymétrie
  5. la combinaison (affermissement, unification, fusion)
    • Regroupement dans l’espace des objets homogènes ou destinés à un fonctionnement en continu
    • Regroupement dans le temps des activités homogènes ou continues
  6. l’universalité
    • Un objet peut effectuer différentes fonctions et par conséquence d’autres éléments peuvent être supprimés
  7. le placement interne (emboîtements gigognes) (Matriochka)
    • Un objet est placé à l’intérieur d’un autre. Cet objet est placé à l’intérieur d’un troisième, et ainsi de suite…
    • Un objet passe à travers la cavité d’un autre objet
  8. le contrepoids
    • Compenser le poids d’un objet en le combinant à un autre objet qui lui fournit une force élévatrice
    • Compenser le poids d’un objet par des forces hydrodynamiques ou aéronautiques.
  9. l’action inverse antérieure
    • Pré-contraindre un objet par une contrainte opposée à celle qu’aura à subir l’objet lors de son utilisation.
  10. l’action préliminaire
    • Effectuer les changements requis sur un objet partiellement ou complètement en avance.
    • Placer les objets en place de manière à ce qu’ils rentrent en action immédiatement depuis l’endroit le plus approprié
  11. la compensation
    • Compenser la relativement faible fiabilité d’un objet par des mesures d’urgence préparées à l’avance.
  12. l’équipotentialité
    • Changer les conditions de travail de telle sorte qu’il ne soit plus nécessaire d’élever ou d’abaisser un objet
  13. l’inversion
    • Au lieu d’une action directe dictée par un problème, installer une action opposée (ex. refroidir au lieu de chauffer)
    • Rendre la partie amovible d’un objet, ou l’environnement extérieur statique ou rendre une partie statique amovible
    • Retourner un objet
  14. la sphéricité
    • Remplacer les parties linéaires par des parties courbes, les surfaces planes par des surfaces sphériques, et les formes cubiques par des formes sphériques.
    • Utiliser des roulettes, des billes, des spirales
    • Remplacer un mouvement linéaire par un mouvement de rotation, utiliser la force centrifuge.
  15. le degré de dynamisme
    • Les caractéristiques d’un objet, ou l’environnement extérieur, douvent être modifiés pour fournir une performance optimale à chaque étape d’une opération.
    • Si un objet est immobile, le rendre mobile. Le rendre interchangeable.
    • Diviser un objet en éléments capables de changer de position relativement les uns par rapport aux autres
  16. le surplus ou réduction (action partielle ou excessive)
    • il est difficile d’obtenir 100% d’un effet désiré, accomplir plus ou moins que ce qui est désiré
  17. le changement de dimension
    • Transformer le positionnement ou le mouvement unidimensionnel d’un objet en bidimensionnel, le bidimensionnel en tridimensionnel, etc.
    • Utiliser la composition multi-niveaux des objets
    • Incliner un objet ou placez-le sur le côté
    • Utiliser le côté opposé d’une surface donnée
    • Projeter des lignes optiques sur les surfaces avoisinantes, ou sur le côté opposé d’un objet
  18. l’oscillation (vibrations)
    • utiliser l’oscillation
    • si l’oscillation existe, augmenter sa fréquence jusqu’au domaine des ultrasons
    • utiliser la fréquence de résonance
    • remplacer les vibrations mécaniques par des piézo-vibrations
    • utiliser les vibrations ultrasoniques en conjonction avec un champ électromagnétique
  19. l’action périodique
    • Remplacer une action continue par une action périodique (impulsion)
    • Si l’action est déjà périodique, changer sa fréquence
    • Utiliser les pauses entre les impulsions pour délivrer des actions additionnelles.
  20. l’action d’utilité
    • Mener à bien une action sans une interruption. Toutes les parties d’un objet devraient fonctionner constamment au maximum de leur capacité.
    • Supprimer les mouvements intermédiaire et d’arrêt.
    • Remplacer les mouvements alternatifs par des mouvements rotatifs
  21. l’aléatoire
    • Effectuer à très haute vitesse les opérations risquées et dangereuses
  22. la transformation d’un moins en plus (tirer d’un mal un bien)
    • Utiliser les facteurs nocif –spécialement pour l’environnement- pour en tirer un effet positif
    • Retirer un facteur nuisible en le combinant avec un autre facteur nuisible
    • Augmenter le degré de nocivité d’un facteur jusqu’à ce qu’il cesse d’être nocif
  23. l’asservissement
    • Introduire une rétroaction
    • Si une rétroaction existe déjà, la changer
  24. l’insertion (médiateur)
    • Utiliser un objet intermédiaire pour transférer ou effectuer une action
    • Relier temporairement l’objet original à un autre qu’il est facile d’enlever
  25. le self service
    • un objet doit de servir lui-même en effectuant des opérations supplémentaire ou de maintenance
    • Utiliser le matériel et l’énergie perdus ou destinés a être jeté
  26. la copie
    • une copie simplifié et bon marché devra être utilisée à la place d’un original fragile ou d’un objet qu’il est difficile de manipuler
    • Si une copie optique visible est utilisée, la remplacer par une copie infrarouge ou ultraviolet
    • Remplacer un objet (ou un système d’objets) par son image optique. L’image peut être réduite ou agrandie.
  27. l’éphémère et l’économique
    • Remplacer un objet cher par un objet bon marché, en compromettant d’autres propriétés (ex. longévité)
  28. la reconception
    • Remplacer un système mécanique par un système optique, acoustique, thermique ou olfactif.
    • Utiliser un champ électrique, magnétique, ou électromagnétique pour interagir avec un objet
    • Remplacer les champs

                                                               i.      stationnaires par des mobiles

                                                             ii.      permanents par des champs variant dans le temps

                                                            iii.      aléatoires par des champs structurés

    • Utiliser un champ en conjonction avec des particules ferromagnétiques
  1. le système hydraulique ou pneumatique
    • remplacer les parties solides d’un objet par un gaz ou un liquide. Ces parties peuvent utiliser de l’air ou de l’eau pour gonflage, ou utiliser un amortissement pneumatique ou hydrostatique
  2. la membrane flexible
    • Remplacer les constructions habituelles par des membranes flexibles ou un film fin
    • Isoler un objet de l’environnement extérieur par des membranes flexibles ou des films minces
  3. la porosité du matériau
    • Rendre un objet poreux, ou utiliser des éléments poreux supplémentaires (inserts, couvertures,…).
    • Si un objet est déjà poreux remplir les pores par avance avec une substance.
  4. le changement de couleur
    • Changer la couleur d’un objet ou des son environnement
    • Changer le degré de transparence d’un objet ou de son environnement
    • Utiliser des additifs colorés pour observer un objet ou un processus, qui est difficile à voir.
    • Si des additifs sont déjà employés, utiliser des traceurs luminescents ou des atomes traces
  5. l’homogénéité
    • Les objets interagissant avec l’objet principal doivent être réalisés dans le même matériel (ou dans un matériel qui a des propriétés similaires) que l’objet principal
  6. le rejet et la régénération
    • Après avoir effectué sa tache, ou être devenu inutile, un élément d’un objet est rejeté (mis au rebus, dissous, évaporé, fusion, réaction chimique, etc.). ou modifié durant le processus de travail
    • Les parties usées d’un objet devraient être rétablies durant son utilisation
  7. le changement de produit (transformation des propriétés)
    • changer l’état physique d’un système
    • changer la concentration ou la densité
    • changer le degré de flexibilité
    • changer la température ou le volume
  8. l’utilisation des changements de phase
    • Utiliser le phénomène de changement de phase (i.e. changement de volume, libération ou absorption de chaleur, etc.)
  9. l’expansion thermique
    • Utiliser l’expansion ou la contraction d’un matériau en changeant sa température
    • Utiliser divers matériaux avec différents coefficients d’expansion thermique
  10. l’oxydation
    • Faire passer l’oxydation d’un niveau au suivant :

                                                               i.      Air ambiant à air oxygéné

                                                             ii.      Oxygéné à oxygène pur

                                                            iii.      Pur oxygène à l’oxygène ionisé

                                                           iv.      L’oxygène ionisé à l’oxygène ozoné

                                                             v.      l’oxygène ozoné à l’ozone

                                                           vi.      l’ozone à l’atome d’oxygène

  1. l’environnement d’insertion
    • remplacer l’environnement normal par un environnement inerte
    • introduire une substance neutre ou des additives à un objet
    • effectuer le processus sous vide
  2. le matériau composite.
    • Remplacer un matériau homogène par un matériau composite

 

 

dimanche, janvier 29, 2006

Résistance, alternative illusoire et logique à multiples niveaux [Milton Erickson]

L'exemple suivant donne une idée de la complexité avec laquelle un expert accompli [Milton Erickson] dans le langage du changement peut entremêler l'utilisation de la résistance, l'alternative illusoire et la logique à multiples niveaux de l'injonction comme forme de communication.

Un soir, le fils d'Erickson, Lal, âgé de huit ans, déclara qu'à partir de ce jour son père n'avait plus d'ordres à lui donner en quoi que ce soit et que, pour le prouver, il refusait de dîner. Erickson accepta le défi, mais fit remarquer qu'il serait regrettable que Lal se refuse à manger. Est-ce que le fait d'accepter ou de refuser de boire un verre de lait ne pourrait pas suffire pour trancher la question? Le garçon acquiesça. Après le dîner, son père posa un grand verre de lait sur la table, et le rituel soigneusement mis au point commença. Erickson s'adressa d'abord à l'enfant en ces termes : « Lai, bois ton lait! u Et ce dernier répondit avec une calme détermination : « Non, je n'y suis pas obligé et tu ne peux pas m'y obliger. » Erickson insista à plusieurs reprises, et puis ordonna soudain : « Lal, renverse ton lait! » Le garçon eut l'air surpris, mais refusa immédiatement de se plier à cette nouvelle injonction. Erickson réitéra également cet ordre un certain nombre de fois, puis demanda à Lal de jeter son verre par terre, ce que, bien entendu, il refusa de faire. Erickson passa alors à l'ordre suivant : «  Ne prends pas ce verre de lait! » Lal souleva alors le verre avec méfiance. Il reçut immédiatement l'ordre de ne pas poser le verre; le verre fut donc rapidement remis sur la table. Le moment crucial de l'interaction survint alors. Je laisse à Erickson le soin de le décrire :

Allant au tableau noir fixé au mur, le père écrivit : «prends le verre» d'un côté et « pose le verre » de l'autre. Il expliqua alors qu'il allait faire un pointage du nombre de fois où Lal ferait quelque chose qu'on lui avait dit de faire. Il lui rappela que les deux ordres écrits au tableau avaient déjà été donnés plusieurs fois, mais que, désormais, il en ferait le compte en inscrivant une marque à la craie chaque fois qu'il ferait l'une des deux choses qu'on lui avait précédemment ordonné d'accomplir. Lal écoutait fort attentivement.

Le père poursuivit :

«  Lal, ne prends pas le verre » et fit une encoche à la craie dans la colonne « prends le verre », ce que faisait Lal par défi. Il lui demanda alors de ne pas poser le verre. Lal le reposa et une nouvelle marque vint alors s'inscrire dans la colonne «  pose le verre ». Le père se livra un certain temps au même exercice pendant que Lal examinait le nombre croissant de marques dans chaque colonne. Puis le père écrivit «  bois ton lait » et «  ne bois pas ton lait », en expliquant que désormais il pointerait les réponses de Lal à ces deux propositions. Lal écoutait attentivement mais commençait à manifester les signes avant-coureurs d'un certain désespoir. Son père lui dit alors gentiment : «  Ne bois pas ton lait maintenant. » Lal porta lentement le verre à ses lèvres, mais entendit : « Bois ton lait » avant d'avoir pu avaler une gorgée. Soulagé, il reposa le verre. Deux marques vinrent s'inscrire respectivement dans chaque colonne. La même scène se reproduisit plusieurs fois. Puis le père ordonna à Lal de ne pas brandir le verre au-dessus de sa tête, mais de le renverser par terre. Lal leva le bras lentement. et, avec précaution, brandit le verre au-dessus de sa tête. Il reçut immédiatement l'ordre de ne pas rester comme ça. Le père passa alors dans l'autre pièce, revint avec un livre et un second verre de lait. Puis il fit remarquer : « Je trouve que tout cela est stupide. Ne pose pas ton verre. » Avec un soupir de soulagement. Lal reposa le verre sur la table, contempla les marques à la craie sur le tableau. poussa encore un soupir et dit : « Restons-en là, papa. » « Certainement, Lal. Ce jeu est non seulement idiot, mais il n'est même pas très drôle. La prochaine fois que nous aurons une dispute à régler, nous ferons en sorte qu'il s'agisse de quelque chose de réellement important, afin que nous puissions y réfléchir et en parler de façon sensée. » Lal acquiesça de la tête. Le père ramassa son livre, vida son verre de lait d'un trait et s'apprêta à quitter la pièce. Lal le regarda faire, prit son verre en silence et but son lait jusqu'à la dernière goutte.

[Milton Erickson cité par Paul Watzlawick dans le langage du changement, Points Seuil 186 (1980), p. 152-153, ISBN 2.02.009387.1].

 

mercredi, janvier 25, 2006

mémétique (principes fondateurs) [Pascal Jouxtel ]

Pascal Jouxtel : Pour moi il y a quatre grands principes fondateurs du monde sensible. Le premier : le principe de rupture, l’émergence du nouveau est possible. Le deuxième : il est possible de séparer ce qui est de ce qui n’est pas. Le troisième : toutes les choses sont reliées, chaque chose perturbe et modifie son environnement. La quatrième : une forme a tendance à se reproduire ; la reproduction de quelque chose qui existe déjà est beaucoup plus probable qu’un nouvel arrangement. On peut le résumer avec l’idée que la réplication est la tendance naturelle de toute forme organisée. Beaucoup de gens voient cela aussi sous l’angle de l’imitation qui est une tendance naturelle de l’homme. Mais il faut aller beaucoup plus loin sur cette question. Depuis que l’on a découvert la théorie des neurones miroirs, toute la théorie de l’imitation est bouleversée (cette théorie dit que quand tu vois faire quelque chose, tu as des neurones qui s’activent exactement comme si tu faisais cette chose).

La mémétique n’est-elle pas à son tour une idée virus ?

Pascal Jouxtel : En effet, le mème des mèmes est auto-référent. Le concept de mème est une catégorie qui se contient elle-même, comme le concept de concept, l’idée d’une idée, etc. Il se trouve que l’autoréférence est aussi liée à l’autoréplication, et aussi à la singularité de la conscience, qui réalise le lien montant entre penser et penser que l’on pense. On rencontre une structure analogue dans les virus informatiques. Tu peux avoir un bout de code considéré comme un vulgaire chaîne de caractère, mais en fait c’est un programme qui peut se réinscrire. On la retrouve aussi dans l’ADN. En gros l’ADN est une chaîne d’instruction qui se reproduit elle-même, l’ADN est à la fois son propre contenu et son propre mode d’emploi. C’est comme si tu mangeais la recette elle-même. Il y a une très jolie formule de Dennett, qui dit en quelque sorte que si l’on étudie comment le mème des mèmes s’est propagé, on peut comprendre ce qu’est la mémétique. C’est là qu’est le paradoxe amusant : si les méméticiens ont raison, et qu’une théorie fausse peut se propager aussi bien qu’une vraie, alors ils nous ont peut-être convaincu de quelque chose qui est faux. Mais si c’est faux alors une telle théorie ne devrait pas nous convaincre !

Propos recueillis par Frank Beau.

Lire plus http://www.internetactu.net/wp-trackback.php?p=6138

 

 

lundi, janvier 23, 2006

corrida et lavage de cerveau (William Sargant)

Wiiliam Sargant, pour signifier les moyens de résister à la conversion forcée, à l’endoctrinement et au lavage de cerveau, utilise la métaphore de la corrida, du « bon » et du « mauvais » taureau.

 

[…] La sûreté du monde libre semble donc reposer sur la culture non seulement du courage, de la vertu morale et de la logique, mais aussi de l'humour : humour qui produit un état de bon équilibre dans lequel l'excès émotionnel est moqué comme laid et inutile.

Dans la corrida, les premiers efforts du matador et de ses assistants sont dirigés directement vers l'excitation, le tourment et la frustration du taureau, dans le but de l'user et ainsi de le rendre plus suggestible et répondant. Le matador doit "dominer" le taureau pour lui faire exécuter ce qu'il attend de lui dans la phase finale : c'est-à-dire de suivre les mouvements de la muleta rouge dans une obéissance hypnotique. Un « bon » taureau qui gagne les applaudissements du public quand il est finalement retiré mort de l’arène est celui qui « coopère » en devenant aussi agressif que possible quand on il est harcelé par les capes, et poignardé dans les muscles des épaules par la lance du picador et les flèches tranchantes du banderillero. Il est maintenu constamment en mouvement jusqu’à ce que épuisé émotionnellement et physiquement, et seulement lorsqu’il ne peut plus maintenir sa tête haute que le matador lui donne le coup de grâce par un brusque mouvement d’épée entre ses omoplates relâchées.

Un « mauvais » taureau – à moins d’une infirmité physique, telle une cécité partielle qui l’empêche de suivre les mouvements de la cape ou de la muleta - est celui qui refuse de s’énerver et ainsi s’arrange pour éviter à la fois l’épuisement et la suggestibilité. Jusqu’à récemment, le remède aux taureaux flegmatiques était les banderillas de fuegosorte de flèche munie d’explosif à la pointe, qui les faisaient ruer et sauter en tout sens dans l’arène - mais qui sont à présent interdites. La terreur du matador est par conséquent le taureau qui ne peut pas être paniqué par les moyens traditionnels, qui semble continuer à penser par lui-même et dont les réponses sont si imprévisibles. Lorsque finalement tué, souvent après avoir envoyé le matador à l’infirmerie ou au cimetière, ou renvoyé par un Président prudent, il sort de l’arène, c’est sous les cris, les injures et les sifflements. Le « bon » taureau, en fait, et le taureau qui se considère (en le créditant de sentiments humains) immunisé contre l’épreuve à laquelle il fait face, confiant dans son courage, sa rapide colère en face des choses qu’il déteste, sa grande force physique, sa capacité à combattre jusqu’au bout. Le « mauvais » taureau est celui qui a un sens plus fort de la conservation de soi que du devoir obstiné.

Il ne faudrait pas pousser l’analogie trop loin ; elle sert à mettre en évidence le fait que certaines personnes sont converties contre leur volonté (endoctrinée) car elle tiennent à faire ce qu’elle considère la « bonne chose » et sortent combattre ce qui est plus sagement évité ou ignoré. Leur énergie devrait plutôt être dévolue à maintenir une politique de non coopération, malgré leur fierté et une inclination naturelle à tester leur force et leur courage contre ceux qui essaient de les provoquer.

 

Extrait traduit librement de Battle for the mind : A physiology of conversion and brain-washing, p.264-266 (ed. 1997), William Sargant, isbn 1-883536-06-5, Malor Book ISHK (1957-1997)

dimanche, janvier 22, 2006

Déshumanisation digitale

« Une société composée de milliers de milliards d’esclaves mécaniques et de seulement deux mille millions d’hommes sera certes gouvernée par les hommes, mais elle aura les traits caractéristiques de sa majorité prolétarienne. […] Les esclaves mécaniques de notre civilisation conservent ces traits caractéristiques et vivent selon les lois de leur nature. […] Pour savoir se servir de ses esclaves mécaniques, l’homme doit apprendre à les connaître et imiter leurs habitudes et principes de fonctionnement. […] Lorsque les conquérants sont en minorités, ils adoptent la langue et les mœurs des nations conquises, par commodité ou pour d’autres raisons, alors même qu’ils sont effectivement les maîtres. Le même processus s’opère actuellement dans nos propres sociétés bien que nous refusions de nous en rendre compte. Nous apprenons les lois de fonctionnement et le jargon de nos esclaves, pour être en mesure de leur donner des ordres. Et, insidieusement, nous sommes amenés à renoncer à nos lois et à nos traits humains. Nous nous déshumanisons en adoptant les habitudes de vie de nos esclaves. Le premier symptôme de cette déshumanisation est le mépris que nous témoignons à l’égard de ce qui fait notre humanité»

Virgil Gheorghiu (1950). La Vingt-Cinquième Heure, Paris, Plon (1974). Cité par Paul Watzlawick, les cheveux du baron de Münchhausen, Points Seuil, (1991) p. 249.

 

La réalité de la réalité (constructivisme)

La réalité est ce que vous dites qu'elle est. Elle est ce que avez construit. Je fais une distinction entre ce que j'appelle réalité de premier ordre et réalité de second ordre. La réalité de premier ordre, c'est l'information que mes sens me font parvenir […], ceci est le résultat d'une construction neuronale extrêmement complexe. A l'extérieur de nous, il n'y a pas de couleur. Nous voyons des couleurs parce que nous avons des yeux. D'une manière invariable, nous attribuons un sens, des significations, des valeurs à ces aspects de la réalité du premier ordre et j'appelle ces attributions que nous donnons à la réalité de premier ordre la réalité de second ordre. Les conflits humains les plus importants surgissent lorsque deux personnes attribuent un sens différent à une réalité qui est perçue en commun. C'est là que le problème commence. Mais c'est là aussi que de grandes opportunités s'ouvrent.

[extrait d’un entretien avec Paul Watzlawick]

Bibliographie de Paul Watzlawick disponible en Français :

·        Une logique de la communication avec J. Beavin et D. Jackson, 1972. Seuil, coll. " Points ", 1979.

·        Changements : paradoxes et psychothérapie avec J. Weakland et R. Fish, 1975, 1975, Seuil, CoIl. " Points ", 1981.

·        Sur l'interaction avec J.H. Weakland, 1977, Seuil, 1981.

·        La réalité de la réalité. 1978, Seuil, coll. " Points ", 1984.

·        Le langage du changement, 1980, Seuil.

·        L'invention de la réalité (dirigé par Paul Watzlawick), 1981, 1985. Seuil, 1988.

·        Faîtes vous-mêmes votre malheur, 1983, Seuil.

·        Comment réussir à échouer, 1986, Seuil, 1988.

·        Guide non conformiste pour l'usage de l'Amérique, 1987, Seuil.

 

 

Biotique, Humanité symbiotique et Big Brother

L’équipe du professeur John K. Chapin de l’École de Médecine de Philadelphie a pu extraire le signal provenant du cerveau de rats et leur faire contrôler à distance un bras robotique. Plus récemment une équipe de Duke University dirigée par Miguel Nicolelis a pu transmettre à 1000 km de distance par Internet l’impulsion nerveuse provenant du cerveau de singes afin de contrôler un bras articulé. Ces travaux ouvrent la voie au secteur prometteur des neuroprothèses capables de jouer un rôle déterminant dans le traitement de certains handicaps moteurs. D’autres laboratoires ont réussi à mettre au point des "neuropuces" (neurochips) en faisant croître des neurones sur des puces en silicium. On a même réussi à forcer les axones de ces neurones à emprunter un chemin programmé d’avance grâce à l’utilisation de surfaces faites des matériaux intelligents, afin de construire des circuits moléculaires fonctionnant à partir de cellules vivantes. Ces circuits ont été capables de traiter de l’information et de la transmettre à des ordinateurs électroniques classiques. Ainsi, grâce à la discipline émergente que nous avons appelé dès 1981, la "biotique" –mariage de la biologie et de l’informatique dans des matériaux intelligents–, l’homme entrera en symbiose avec les réseaux d’information qu’il a extériorisé de son propre corps. Les systèmes nerveux planétaires qui se mettent en place, constituent un super organisme dont nous sommes les neurones. L’homme symbiotique peut vivre en harmonie avec l’organisme planétaire qu’il a créé, ou subir l’emprise d’un Big Brother à l’échelle du monde.

Extrait de De La Biologie Moléculaire À La Biotique: L’essor Des Bio-, Info- Et Nanotechnologies, Joël De Rosnay Cellular and Molecular Biology 47 (Supplément), 7-16 (2001)

 

les blogs que je lis

L'ignorance

- Quel âge avais-tu?

- A peine vingt ans. Et, dès lors, tout était décidé une fois pour toutes. C'est à ce moment-là que j'ai commis une faute, une faute difficile à défi­nir, insaisissable, mais qui a été le point de départ de toute ma vie et que je n'ai jamais réussi à réparer.

- Une faute irréparable commise à l'âge de l'ignorance.

- Oui.

- C'est à cet âge-là qu'on se marie, qu'on a son premier enfant, qu'on choisit sa profession. Et puis un jour on sait et on comprend beaucoup de choses, mais il est trop tard, car toute la vie aura été décidée à une époque où on ne savait rien.

 

Extrait de L’ignorance (p.152), Milan KUNDERA, Gallimard (2003), ISBN 2-07-076903-8

 

Sur l’avenir, tout le monde se trompe. L’homme ne peut être sûr que du moment présent. Mais est-ce bien vrai ? Peut-il vraiment le connaître, le présent ? Est-il capable de le juger ? Bien sûr que non. Car comment celui qui ne connaît pas l’avenir pourrait-il comprendre le sens du présent ? Si nous ne savons pas vers quel avenir le présent nous mène, comment pourrions-nous dire que ce présent est bon ou mauvais, qu’il mérite notre adhésion, notre méfiance ou notre haine ?

 

4e de couverture de L’ignorance (Milan KUNDERA, Gallimard (2003), ISBN 2-07-076903-8)

 

jeudi, janvier 19, 2006

En boite ou les conséquences de la pensées causales

B. F. Skinner, le psychologue et psycholinguiste américain, plaça des pigeons dans ce que nous appelons maintenant des « boîtes de Skinner », en ne mettant qu'un pigeon par boite L'expérimentateur voit à l'intérieur de ces boîtes, mais l'oiseau perçoit uniquement les messages qu'il choisit de lui transmettre. Skinner plaça donc ses pigeons dans une série de boîtes, et mit en place son expérience de façon à ce qu'un mécanisme lance dans chaque boîte une boulette de nourriture à intervalles réguliers. Cependant, bien que cela ne soit pas toujours pris considération, les pigeons ne réagissent pas simplement comme des robots. Ils ont leurs propres réflexes et programmes, et sont continuellement engagés dans une activité : ils marchent, regardent autour d'eux, lissent leurs plumes, etc. Ainsi, l'apparition de la boulette coïncide toujours avec un mouvement que les pigeons sont en train de faire. Et, au bout d'un certain temps, l'apparition de la boulette aura nécessairement coïncidé plusieurs fois avec un mouvement précis.

Extrait d'un texte de Rupert Riedl publié dans le livre L'invention de la réalité (Seuil, 1988) sous la direction de P. Watzlawick (p.90-91)

Boulettes [ les conséquences de la pensées causales (suite)]

A partir de là, un étonnant processus d'apprentissage commence. Le mouvement qui s'est trouvé associé avec l'apparition de la nourriture - par exemple un pas sur la gauche - est dès lors répété plus fréquemment, la coïncidence devient, elle aussi, plus fréquente. Ainsi, la « prévision » du pigeon selon laquelle il existe une relation entre la nourriture et ce mouvement précis est pour lui de plus en plus confirmée, jusqu'à l'évidence presque absolue que le mouvement maintenant répété constamment, est nécessairement suivi par l'apparition de nourriture. En effet, si le pigeon ne fait rien d'autre que des pas sur la gauche, chaque boulette représente manifestement une récompense et une confirmation. Le résulta de l'expérience, c'est qu'un grand nombre de pigeons devienne fous : l'un tourne sans arrêt sur la gauche, l'autre déploie constamment son aile droite, et un troisième tourne continuellement la tête d'un côté puis de l'autre. On conclura de tout ceci que la « prédiction » d'une relation causale se vérifie d'elle-même.

Extrait d'un texte de Rupert Riedl publié dans le livre L'invention de la réalité (Seuil, 1988) sous la direction de P. Watzlawick (p.90-91)

 

Superstitions [ les conséquences de la pensées causales (suite2)]

Maintenant, dans quelle mesure, nous, êtres humains, sommes victimes de telles « prédictions qui se vérifient d'elles-mêmes », […] on peut déjà affirmer que les racines de cette forme de superstition sont héréditaires et profondément ancrées en nous.

Il nous est à tous déjà arrivé de « toucher du bois » pour écarter le mauvais sort d'une prévision que l'on souhaite vivement voir se réaliser. Certains font même le geste amusant de toucher leur propre tête quand ils n'ont pas de bois à portée de la main. Et, puisque, dans la majorité des cas, la chance semble plutôt nous sourire, nous devons bien admettre que ce geste a été efficace.

Extrait d'un texte de Rupert Riedl publié dans le livre L'invention de la réalité (Seuil, 1988) sous la direction de P. Watzlawick (p.90-91)

mardi, janvier 17, 2006

Meta-informations et meta-connaissances

Les méta-connaissances sont des connaissances sur notre façon d'acquérir et de créer des connaissances. Les méta-informations sont des informations sur notre façon de trouver, de traiter et de produire des informations.
Partager vos méta-connaissances !

Que voulons-nous transmettre ?

L'espèce humaine a consacré une grande partie de son énergie à se perpétuer et à transmettre les connaissances acquises par une génération à la génération suivante.
La quantité d'information disponible s'accroît exponentiellement, au point que trouver les connaissances essentielles parmi toutes celles qui sont disponibles relève de l'exploit ou du hasard. Quelles sont les connaissances que nous voulons transmettre ?

Evaluation et Adaptation

Dans un environnement en constante évolution, comment diriger son attention sur les compétences qui permettent une adaptation rapide et adéquate aux changements perçus ?
Comment évaluer la situation vécue ? Comment évaluer la pertinence de l'évaluation ?

Meta-information (suite)

Pour trouver une information sur un sujet précis :
1. Définir la durée de la recherche (ne pas excéder 2h sur internet)
2. Extraire des mots-clés signifiants, préférer les mots rares
3. Utiliser un moteur de recherche performant (ex. Google)
4. Trouver d'autres mots-clés et références de livres et de revues sur le sujet
5. stocker les informations avec les URL (adresses)
6. si vous n'avez pas trouvé en moins de 20 minutes, tenter un méta-moteur, explorer les sites qui ont des informations sur des sujets très proches et essayez de trouver un expert.
7. si vous n'avez toujours pas trouvé, tentez les groupes de discussion et les blogs...
8. Si vous avez besoin de place, conservez seulement les URL et les mots-clés.

meta-connaissances (suite)

La méthode scientifique fonde comme principe que toute théorie doit comporter les éléments permettant dans le cadre de cette même théorie de démontrer son inexactitude.
La méthode traditionnelle établit comme principe que toute connaissance est reçue d'un maître qui la transmet à son tour après l'avoir lui-même reçue.
Ainsi nous n'avons pas à réinventer l'eau chaude à chaque génération et nous pouvons vivre sereinement face aux questions de l'origine, de l'identité et du devenir. (Souvenons-nous de Pierre Dac : je suis moi, je viens de chez moi et j'y retourne !)
Quelles révolutions scientifiques et philosophiques avons-nous connu de notre vivant ? Quelles sont celles qui nous survivront ?

lundi, janvier 16, 2006

Consolations...(mèmes bilingues chinois français)

使  

Quand les pensées s'agitent en foule au dedans de moi, Tes consolations réjouissent mon âme. (Ps 94.19) (Xe au IVe  siècle avant J.C.)

 

Oui, vous sortirez avec joie, Et vous serez conduits en paix; Les montagnes et les collines éclateront d'allégresse devant vous, Et tous les arbres de la campagne battront des mains. (Isaïe 55.12) (VIIIe  siècle avant J.C.)

 

Il est frappant de constater que ces textes nous sont parvenus à travers les âges avec très peu de modifications. Pendant combien de temps encore pourrons-nous lire les K7, les CD et les DVD ? Qui peut encore lire les disques vinyles ?

Qu’adviendra-t-il du papier et autres supports lorsque tout (beaucoup) sera numérisé ?

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